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Les couverts permettent de restaurer la fertilité des sols

Dans un entretien, Matthieu Archambeaud, agronome indépendant, livre son point de vue sur les couverts végétaux.

Matthieu Archambeaud : « Les mélanges sont un facteur de sécurité. »
Matthieu Archambeaud : « Les mélanges sont un facteur de sécurité. »
© Olivier Joly

Loiret agricole et rural : Qu’est-ce qu’un couvert végétal ?

Matthieu Archambeaud : On appelle couvert végétal une plante destinée à couvrir le sol à une période où il est généralement nu, c’est-à-dire entre deux cultures dans un système agricole. Un couvert sert à protéger le sol : dans le milieu naturel, un sol n’est jamais nu. Si vous regardez une prairie ou une forêt, on n’a pas de sol dénudé, sauf dans les déserts. Cette couverture protège des intempéries, freine l’érosion et permet d’avoir des conditions d’humidité et de température compatibles avec la vie : le sol abrite une vie très importante et, le fait de le couvrir, lui permettra de travailler en continu. Un autre effet est lié au système racinaire du couvert : il va aller explorer le sol. Donc, il va contribuer à le structurer et à nourrir une autre activité biologique. Il va également recycler les éléments minéraux restants des cultures précédentes ou qui sont produits par la minéralisation de la matière organique. En d’autres termes, on cherche à imiter le système naturel pour que ça fonctionne le mieux possible.

LAR : Comment fait-on pour implanter ses couverts ?

M.A. : Dans les campagnes, on observe des implantations trop tardives : fin août ou début septembre. Essentiellement pour des raisons de sécheresse. Or implanter un couvert dans un sol desséché, surtout s’il l’a été par un travail du sol, s’avère très compliqué. On est obligé d’attendre le retour des pluies de fin août ou début septembre pour semer. On va donc essayer de prendre la problématique à l’envers : profiter de l’humidité résiduelle d’après moisson, période qui ne dure qu’un jour ou deux, pour implanter le couvert. À la bonne profondeur. Bien rappuyé. Bien placé pour que les graines germent. Et, une fois qu’elles ont germé, elles peuvent tenir dans des conditions plus sèches. La clé est donc de ne pas tarder après moisson.

LAR : Quel type de couverts faut-il implanter ? Quelle est la combinaison idéale ?

M.A. : Les mélanges, qu’on appelle biodiversité, sont un facteur de sécurité. Les plantes occupent des niches différentes dans le sol et sur le sol. Elles prospectent également des éléments minéraux différents. Si un ravageur attaque une plante, une autre s’en sortira. Le mélange est un principe de base dans les couverts. C’est un gage de sécurité. Qu’on ne peut pas appliquer ou difficilement en agriculture car on aime bien faire de la monoculture. Pour des raisons de commercialisation et de tri derrière. En intercultures, il ne faut pas se priver : plus on mettra d’espèces, mieux ce sera. Quant à leur conception, les mélanges comptent de quatre à huit espèces différentes en essayant de combiner des familles ayant des caractéristiques complémentaires. Par exemple, en été, on sait que les crucifères, la famille de la moutarde et des radis, fonctionnent assez bien. Ils ont un effet structurant dans le sol relativement profond. Mais ces plantes sont très gourmandes en azote : si on ne les fertilise pas, il ne se passe pas grand-chose ! Mais une association avec des légumineuses permet un développement de ces crucifères et aux légumineuses de fixer beaucoup d’azote de l’air. Quand elles sont bien dosées, la plupart des plantes cultivées peuvent s’associer.

LAR : En Beauce, quelles sont les grandes problématiques relatives à l’implantation des couverts ?

M.A. : Les principes sont les mêmes partout sur la planète. Si on réduit le spectre à l’échelle de la France, les couverts fonctionnent correctement du nord au sud du pays. L’intérêt du climat beauceron : on peut faire ces implantations très précoces après la moisson. Sauf année exceptionnelle comme en 2016. Mais huit ou neuf années sur dix, les implantations précoces après le 15 juillet donneront de bons résultats. Quelque chose qu’on ne peut pas faire dans le sud de la France, où les conditions climatiques sont plus rudes.

LAR : Quand faut-il détruire les couverts ?

M.A. : Plus que la date, c’est le stade de végétation qui importe. On recherche une matière de couverture qui reste verte :
une matière qui reste verte est une matière sucrée, facile à détruire et qui se décomposera rapidement. Donc, elle ne posera pas de problème pour les implantations suivantes. L’un des paramètres que je cite couramment, c’est la floraison : on ne va pas pousser les couverts très loin après la fructification. Sinon, on se retrouve avec des plantes ligneuses qui nous intéressent moins. En fonction des choix, on aura des plantes qui monteront très vite à graine, donc qu’on pourra utiliser sur des intercultures courtes. Par exemple, la moutarde. D’autres plantes ont des cycles plus longs et on pourra les semer plus tôt sans problème. En termes de destruction, à l’automne, pas besoin de délais entre la destruction du couvert et l’implantation de la culture suivante.

LAR : Les couverts posent la question du désherbage :
quelle réponse y apportez-vous ?

M.A. : Souvent, on associe la couverture des sols et les semis directs au glyphosate. Or plus on maîtrise les couverts végétaux, plus on arrive à couvrir les sols tôt et avec une végétation abondante, plus les sols sont propres. L’enjeu est donc de réussir ses couverts : plus c’est le cas, plus les couverts occupent le terrain et moins on aura d’adventistes. Par conséquent, moins on mettra d’herbicides.

LAR : Les agricultures considèrent les couverts comme une contrainte : qu’auriez-vous envie de leur dire ?

M.A. : Effectivement, les couverts sont une contrainte technique. C’est également un investissement. En temps et en argent. Mais je verrais plutôt les couverts comme un outil très efficace dans des systèmes où on essaie de se baser sur la restauration de la fertilité des sols. Autrement dit, on peut voir les couverts sous deux angles : l’angle réglementaire. Dans ce cas-là, il ne faut pas mettre trop d’argent. On se contrera de moutarde, etc. Dans une autre approche, le couvert est la base d’un système qui, à terme, permettra de mettre moins de puissance, moins de carburant, moins d’engrais et moins d’herbicide. Un système qu’on établit sur du long terme : cinq à dix ans. Dans ce cas-là, c’est une contrainte technique mais c’est outil dans lequel on investit : ce n’est pas une dépense inutile. Ou comment transformer une contrainte en atout !

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