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Congrès FNPF : La filière doit compter sur elle-même

Attentes sociétales multiples, idéalisation des produits bios, guerre des prix, l’équation que les producteurs de fruits doivent résoudre est loin d’être simple.

© Etienne Ansotte - CE

Elle l’est encore moins pour les politiques qui semblent avoir jeté l’éponge : la filière doit donc s’organiser pour mieux communiquer sur ses pratiques, rappeler les atouts des fruits et gagner de nouveaux marchés. En matière d’alimentation, de nouvelles attentes émergent depuis cinq ans, a rappelé Eric Birlouez, agronome et sociologue de l’alimentation, lors du congrès de la Fédération nationale des producteurs de fruits (FNPF), le 1er février à Paris. Certaines peuvent être bénéfiques aux fruits : non transformés, ils véhiculent une image saine et naturelle ; les nouveaux styles d’alimentation (véganisme, sans gluten, etc.) sont tous compatibles avec leur consommation, et leur praticité est un avantage dans une société du nomadisme alimentaire (un tiers des repas sont pris hors du domicile), adepte du snacking sain. Chez Carrefour, les ventes de petits produits fruits prêts à manger, comme les framboises ou les myrtilles, « progressent de 20 à 30 % chaque année », explique Mathieu Lovery, directeur Fruits et légumes du groupe.

Rassurer le consommateur

Si l’origine française est également plébiscitée, les attentes émergentes des consommateurs témoignent aussi de leur besoin de réassurance. Ainsi, en 2016, 79 % des Français jugeaient probable que l’alimentation nuise à leur santé, contre 59 % en 2014, d’après une étude TNS Food 360. La méfiance vis-à-vis des produits chimiques a boosté la consommation de produits bios et cristallisé une opposition des modèles qui risque à terme de fragiliser l’ensemble de la filière, alors même qu’en dehors des frontières, la réputation de qualité de l’agriculture française n’est plus à faire, estime Sylvie Brunel, géographe et auteur d’un livre à la gloire de la pomme. « Il faudrait dire la vérité sur la pression parasitaire », note-t-elle. Car les contraintes sont également économiques : les producteurs sont prêts à adopter de nouvelles méthodes, un matériel plus économe en produits d’épandage, mais dans un contexte de guerre des prix, le coût supplémentaire induit n’est jamais répercuté à la vente et la valeur ajoutée, pour le producteur, s’avère inexistante.

La situation semble néanmoins évoluer, veut croire Mathieu Lovery. « On fait deux fois moins de catalogues de promotion qu’il y a quatre ans », revendique-t-il. Sans compter qu’une frange de la population est aujourd’hui prête à payer plus cher des produits de qualité. La communication sur la qualité supérieure du produit comme du service s’avère indispensable. Dans la grande distribution, des efforts doivent être faits sur la présentation ou l’accompagnement à la vente. Sans doute faut-il aussi répondre aux attaques des environnementalistes par des arguments du même registre, ajoute de son côté Luc Barbier qui souhaite que le consommateur prenne en compte dans son acte d’achat l’empreinte mais aussi le stockage du carbone lié à son produit, ainsi que les implications économiques et sociales du maintien de l’agriculture sur les territoires.

Un ministre toujours absent

Pour accompagner les producteurs face à ces défis, Luc Barbier ne compte plus, en tout cas, sur la puissance publique : devant un pupitre laissé vide par l’absence de représentant du ministre de l’Agriculture malgré une invitation, le président de la FNPF, échaudé par de trop nombreuses incompréhensions avec « le porte-parole du Gouvernement », a fustigé le quinquennat qui s’achève. « Entre 2012 et 2015, on a eu - 2 % de surfaces en verger en France, la perte principale étant en prunes avec -10 %. Sur la même période, les charges ont augmenté de 13 % », constate Luc Barbier. Dans les situations difficiles – crise climatique, de marché, embargo russe, etc., Stéphane Le Foll « n’a jamais mis en valeur les atouts de notre métier », lui reproche le président de la FNPF. Il a en revanche supprimé le diméthoate, insecticide utilisé en arboriculture, « pour des raisons politiques », et rogné les crédits dont la filière avait besoin pour développer des actions de communication.

Malgré tous ces rendez-vous ratés avec les arboriculteurs, il reste une raison pour laquelle Luc Barbier remercie le ministre : « la suppression de la TFA, vécue comme un coup de massue au début mais dont collectivement, avec l’interprofession, nous avons fait un atout, et c’est le point de départ du monde de demain », estime le producteur. L’ensemble de la filière a en effet été capable de mettre en place une Cotisation volontaire obligatoire pour financer son centre technique. Et c’est collectivement qu’à l’avenir, la filière doit avancer sur les autres défis, comme la modification des appels d’offres pour faciliter l’accès des producteurs français à la RHD, la valorisation de la qualité des fruits dans les produits transformés également, mais aussi sur la réduction de l’usage des phytosanitaires. C’est donc avec un pragmatisme teinté d’espoir que Luc Barbier a clôturé le congrès : « n’attendez pas de la campagne politique actuelle qu’elle mette l’agriculture au cœur du débat, car si un homme politique défend les agriculteurs, toutes les associations environnementales vont lui taper dessus. La solution se trouvera chez nous ! »

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